Depuis que je travaille comme ingĂ©nieure pĂ©dagogique, jâai rencontrĂ© beauuuuuuuuuuuucoup dâexperts mĂ©tier (genre beaucoup beaucoup đ).
MalgrĂ© la diversitĂ© de leurs expertises, malgrĂ© la diversitĂ© de leurs personnalitĂ©s, et malgrĂ© la diversitĂ© des projets sur lesquels jâai travaillĂ©, je voulais vous parler dâune constante commune...
Cette constante qui fait que je sais toujours comment dĂ©marrer un projet : le fait que je mâintĂ©resse aux expertises mĂ©tiers Ă tel point que je la comprends.
Alors je ne rentrerais pas ici dans la dĂ©finition du terme âexpert mĂ©tierâ (je garde ça pour un prochain article !). Mais disons que jâentends par âexpertise mĂ©tierâ la maĂźtrise de savoirs.
En dĂ©but de projet, les ingĂ©nieurs pĂ©dagogiques reçoivent trĂšs frĂ©quemment des contenus âbrutâ de formations (des ppts, des vidĂ©os, des Ă©crits, etc) de la part dâexperts mĂ©tiers.
Dans cet article, je regarde les besoins rĂ©ciproques de lâexpert mĂ©tier et de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique afin de proposer des solutions amĂ©liorant la collaboration entre ces deux acteurs.
Les compĂ©tences clĂ©s de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique nĂ©cessaires Ă la traduction des savoirs savants en savoirs Ă enseigner
Puisque lâingĂ©nieur pĂ©dagogique doit faciliter et traduire les savoirs de lâexpert mĂ©tier pour quâils deviennent accessibles pour lâapprenant, quelles compĂ©tences ou quels prĂ©requis doit-il avoir sur le sujet Ă enseigner ?
1er cas :
LâingĂ©nieur pĂ©dagogique ne possĂšde AUCUNE connaissance de base sur le sujet Ă enseigner : il est un profane aux yeux de lâexpert.
Une collaboration effective entre eux est difficile car une trop grande différence de type de savoirs existe entre leurs spécialités (Anh Phi Thi, 2018 ; Denis, 2017).
SchĂ©ma illustrant les cadres de rĂ©fĂ©rences des savoirs de lâexpert mĂ©tier et de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique. Lorsque lâingĂ©nieur pĂ©dagogique nâa aucune connaissance de base dans le domaine de spĂ©cialitĂ© de lâexpert mĂ©tier, une sĂ©paration existe que lâingĂ©nieur pĂ©dagogique devra combler pour assurer la traduction des savoirs.
Câest dâautant plus vrai si on parle de la crĂ©ation dâune formation pour un niveau âintermĂ©diaireâ ou âavancĂ©â. Comment voulez-vous que lâingĂ©nieur pĂ©dagogique se mette Ă la place de lâapprenant sâil est lui-mĂȘme âdĂ©butant / noviceâ ??
Pour se mettre Ă la place de lâapprenant et sâassurer de la bonne adĂ©quation entre savoirs savants et savoirs Ă enseigner, lâingĂ©nieur pĂ©dagogique doit lui-mĂȘme sâinstruire pour avoir un niveau de comprĂ©hension au moins Ă©gal Ă celui de lâapprenant. Quelle perte de temps !
Il existe un manque Ă combler entre les savoirs respectifs de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique et ceux de lâexpert mĂ©tier.
2Ăšme cas :
Si au contraire, lâingĂ©nieur pĂ©dagogique possĂšde dĂ©jĂ CERTAINES connaissances sur le sujet Ă enseigner : il peut alors les utiliser pour faciliter la communication avec lâexpert mĂ©tier et proposer des solutions pĂ©dagogiques plus adaptĂ©es.
SchĂ©ma illustrant les cadres de rĂ©fĂ©rences des savoirs de lâexpert mĂ©tier et de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique. Lorsque lâingĂ©nieur pĂ©dagogique possĂšde des connaissances de base dans le domaine de spĂ©cialitĂ© de lâexpert mĂ©tier, un chevauchement existe permettant Ă lâingĂ©nieur pĂ©dagogique de facilement assurer la traduction des savoirs.
Les connaissances de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique dans le domaine dâexpertise de lâexpert mĂ©tier peuvent ĂȘtre variĂ©es. Le fait que lâingĂ©nieur pĂ©dagogique puisse dĂ©montrer dâune comprĂ©hension de savoirs spĂ©cifiques Ă la formation dĂ©veloppĂ©e permet de mettre Ă lâaise et installe un climat de confiance entre lui et lâexpert mĂ©tier. Ce climat de confiance est la pierre angulaire dâune collaboration de travail effective.
Par consĂ©quent, je nâhĂ©site pas Ă mettre en avant lâavantage que lâingĂ©nieur pĂ©dagogique apporte au projet en possĂ©dant cette « double casquette » de savoirs :
- savoirs dans le domaine de spĂ©cialitĂ© de lâexpert mĂ©tier permettant de communiquer, conseiller, et traduire les savoirs savants en savoirs Ă enseigner ;
- savoirs dans le domaine de la pédagogie pour accomplir les tùches plus ordinairement demandées à un ingénieur pédagogique.
La notion de « double casquette » de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique nâest pas encore une notion largement Ă©tudiĂ©e, et il semble difficile de prĂ©dire le gain apportĂ© par le chevauchement des savoirs entre ceux de lâingĂ©nieur pĂ©dagogique et ceux de lâexpert mĂ©tier.
Et pourtant, un grand nombre dâentreprises de crĂ©ations de formations se vantent dâĂȘtre spĂ©cialisĂ©es dans un domaine particulier, et utilisent cette spĂ©cialitĂ© pour capter de nouveaux clients (cherchez donc sur internet, vous serez surpris de voir des cabinets de formations spĂ©cialisĂ©es en finance, en assurance, en bien-ĂȘtre au travail, en sport, etc...).
Moi, je suis spĂ©cialisĂ©e dans la crĂ©ation de contenus de formations scientifiques, avec une appĂ©tence toute particuliĂšre dans les domaines des sciences de la terre et de lâenvironnement ! Je vois cette spĂ©cialisation comme une force ! Je peux ainsi âbriser la glaceâ plus facilement avec les experts mĂ©tiers avec lesquels je travaille.
En demarrant un nouveau projet de formation, le fait de connaitre parfaitement le domaine pour lequel les ingénieurs pédagogiques créent des formations, représente un gain éborme pour les clients.
Vers une collaboration effective entre de lâexpert mĂ©tieret lâingĂ©nieur pĂ©dagogique
Pour quâune collaboration effective existe avec lâexpert mĂ©tier, lâingĂ©nieur pĂ©dagogique doit justifier dâune double compĂ©tence pĂ©dagogie/savoirs savants de lâexpert mĂ©tier.
Ainsi, sa posture devra lui permettre :
- DâĂ©tablir un climat de confiance par le partage de connaissance dans le domaine de spĂ©cialisation de lâexpert mĂ©tier ;
- DâĂȘtre un novice pertinent : sans en savoir plus que de lâexpert mĂ©tier, il peut suggĂ©rer des idĂ©es ou orienter ses questions ;
- DâĂȘtre curieux : la curiositĂ© est un gage de saine rĂ©flexion et dâintĂ©rĂȘt ;
- DâĂȘtre source dâenrichissement : Ă©tablir une relation donnant/donnant qui entretient la dynamique et la motivation ;
- DâĂȘtre clairvoyant : lâingĂ©nieur pĂ©dagogique doit percer les difficultĂ©s et agir en consĂ©quence ;
- DâĂȘtre rigoureux : pour Ă©viter les trous de connaissance.
De la mĂȘme façon, lâexpert mĂ©tier engagĂ© dans un projet de formation ne doit pas ĂȘtre freinĂ© par la peur de se lancer dans un projet peut ĂȘtre nouveau pour lui.
Il doit ĂȘtre aidĂ© pour Ă©viter « la malĂ©diction de lâexpert » poussant Ă lâenthousiasme bĂ©at et la narcissisation, trop frĂ©quemment observĂ©s.
Il doit ĂȘtre rassurĂ© sâil nâest pas « bon pĂ©dagogue » ou sans expĂ©rience en communication par lâingĂ©nieur pĂ©dagogique travaillant avec lui.
LâingĂ©nieur pĂ©dagogique devra transformer ces freins en leviers en apportant une structure claire au lâexpert mĂ©tier, dĂšs le dĂ©marrage du projet. DĂ©marrer en identifiant une expertise rare et produire des contenus âbeauxâ et rĂ©ussis. Tous les experts mĂ©tier sont sensibles Ă lâaspect visuel des modules qui reprĂ©sentent des leviers de reconnaissance face Ă leurs pairs.